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Les principales méthodes de fixation des prix – Partie I

Le ‘Value-Based Pricing’ et les méthodes alternatives

Générant beaucoup d’encre et de débats, le ‘Value-Based Pricing’ (Pricing fondé sur la valeur) est souvent considéré comme la méthode idéale de fixation des prix. Mais son usage effectif se limite aux contextes dans lesquels une différenciation tangible des produits, c’est-à-dire une véritable innovation, peut être démontrée.

Pour commencer, nous allons examiner comment est défini le Value-Based Pricing. Bien qu’il fasse l’objet de nombreuses discussions, il existe une confusion persistante – à la fois parmi les spécialistes du marketing et les experts en Pricing – sur ce que ce concept signifie réellement. Nous poursuivrons ensuite avec une définition rapide des approches de pricing alternatives observées sur le marché.

« Le Value-Based Pricing est la méthode de fixation d’un prix par laquelle une entreprise détermine et tente de capturer la valeur différentielle apportée par son produit à son client par comparaison à son concurrent. » Nous aimons particulièrement cette définition en raison de sa clarté et de sa brièveté, rédigée par Utpal M. Dholakia1 dans un article2 publié dans la Harvard Business Review en août 2016.

Également appelé Value Pricing, ce concept se concentre sur les attributs de l’offre qui ajoutent de la valeur pour le client et que celui-ci peut convertir en monnaie sonnante et trébuchante. C’est une stratégie de fixation des prix très dynamique et centrée sur les besoins du client, sans rapport avec les niveaux de prix du marché. Lorsque le Value-Based Pricing est correctement mis en œuvre, il doit permettre aux entreprises d’améliorer fortement leur rentabilité. Cependant, comme le souligne M. Dholakia: «Ce n’est pas parce que la valeur différentielle est de $150 que l’entreprise pourra la récupérer en totalité. Dans de nombreuses situations [ …],  il y aura un processus de négociation, et le vendeur devra peut-être partager la valeur différentielle avec le client. » Même si c’est le cas, la valeur créée par cette différenciation devrait se traduire par une augmentation significative de la marge et l’avantage concurrentiel qu’elle confère va probablement générer une croissance des volumes et des gains de parts de marché.


Le Value-Based Pricing est particulièrement pertinent lors de la vente de produits innovants, où il est possible de démontrer la différenciation et d’évaluer la valeur de cette innovation pour le client par rapport à la meilleure alternative disponible chez la concurrence. En pratique, il exige que le vendeur ait une compréhension approfondie des processus et de la structure de coût de son client afin de pouvoir le convaincre que les produits ou services en question offrent une valeur supplémentaire et quantifiable par rapport à l’offre existante (que ce soit celle de la concurrence ou la précédente offre de l’entreprise), justifiant ainsi un prix plus élevé.

Dans son article, M. Dholakia apporte un commentaire intéressant sur l’évaluation de la valeur différentielle : « La méthode met l’accent sur les fonctionnalités qui ajoutent de la valeur pour le client… Des fonctionnalités telles que « plus durable de X% », « plus rapide de Y heures », « moins susceptibles de se décomposer de Z% », fonctionnent toutes bien car elles peuvent être facilement converties en argent. Mais il est beaucoup plus difficile de gérer la valeur d’une marque de cette façon. C’est pourquoi la valeur de la marque n’est pas prise en compte dans l’équation du Value-Based Pricing. »

Malheureusement, le Value-Based Pricing est assez difficile à mettre en pratique et pour la plupart des entreprises, elle ne s’applique qu’à une petite fraction de leur chiffre d’affaires. En conséquence, elles mettent généralement en œuvre une ou plusieurs méthodes de pricing alternatives, laissant souvent ainsi de l’argent sur la table :

  • Le pricing en ‘Cost-Plus se traduit par l’application d’un taux de marge homogène sur les coûts directs. Par construction, elle ne peut être alignée sur la stratégie commerciale de l’entreprise. On l’observe encore trop souvent dans les industries B2B. Elle peut générer des pertes de valeur importantes en conduisant simultanément à des pertes de part de marché dues à des prix trop élevés d’une part, et à une sous-tarification conduisant à une perte de valeur d’autre part. En appliquant cette approche, l’entreprise risque de faire face à une baisse d’utilisation de ses capacités de production, de vendre ses produits les plus techniques à des niveaux de marge beaucoup trop faibles, et au total de voir sa rentabilité s’éroder progressivement.
  • Le pricing ‘au Marché’ s’applique lorsque le prix de vente est tout simplement fixé par référence à un cours externe et public résultant de l’équilibre entre l’offre et la demande pour un marché donné.C’est le cas de la plupart des vraies commodités, comme les matières premières et de nombreux produits transformés, pour lesquelles il existe des plateformes de marché et de trading comme le CME (‘Chicago Mercantile Exchange’) ou le LME (‘London Metal Exchange’). Dans de tels cas, les entreprises doivent se concentrer autant que possible sur la différenciation de leur offre (‘de-commoditization’) par le biais de services tangibles apportés autour du produit (logistique, service après-vente…) et d’autres mesures plus qualitatives. Malheureusement, cette tentative de différenciation se traduit rarement par une prime de prix. L’entreprise devra dans tous les cas fournir à sa force de vente les bons conseils afin de contrôler strictement le respect de sa recommandation de prix (‘price guidance’) et protéger au mieux ses marges grâce à l’indexation. L’entreprise devra alors prendre garde à ne suivre les prix de marché que pour les vraies commodités et non pour toute sa gamme de produits et services.
  • Le pricing concurrentiel consiste pour l’essentiel à s’aligner sur les prix de la concurrence dans un ou plusieurs segments de marché. A première vue, l’approche est très simple lorsqu’il s’agit uniquement d’être suiveur, mais elle suppose déjà de pouvoir récupérer ces prix, ce qui n’est pas un exercice facile. En effet, un tarif public en B2B n’est jamais que le reflet imparfait de la politique de prix du concurrent, et il peut masquer de fortes disparités de remises commerciales selon les clients. De même, la collecte des prix des concurrents par l’équipe commerciale est rarement fiable. Cette approche peut être aussi utilisée de manière beaucoup plus proactive, lorsque l’entreprise fixe des prix très agressifs sur un nombre limité de produits connus des clients, ce qui renforce son image prix sans pour autant mettre ses marges en danger. Ou encore pour empêcher un concurrent ciblé de mener à bien une campagne commerciale, par exemple en contrant le lancement d’un nouveau produit par des promotions. Dans tous les cas, la veille concurrentielle est une composante importante d’une stratégie de prix.
  • Le pricing fondé sur l’analyse de l’élasticité est la méthode par laquelle les prix sont fixés en vue de maximiser la marge de masse sur coûts variables, définissant ainsi le meilleur prix théorique. Le plus souvent, lorsque le prix baisse, il y a une augmentation de volume due à l’élasticité de la demande (élasticité négative). Il existe donc un prix idéal qui équilibre la baisse de marge liée au volume et la hausse de marge liée au prix. Cette approche a une applicabilité limitée dans les marchés B2B où il y a souvent un manque de données comparables et une transparence des prix limitée. En outre, dans la plupart des industries B2B, il est essentiel de prendre en compte les coûts fixes et de capital ainsi que les contraintes de capacité. Néanmoins, en analysant simplement leurs propres données de vente, en particulier l’évolution des volumes et les taux de vente par rapport aux niveaux de prix ou de remise, les entreprises B2B peuvent déjà obtenir des informations très pertinentes pour analyser la sensibilité prix. Dans tous les cas, pour définir une stratégie de prix appropriée, il est nécessaire d’avoir une bonne compréhension des drivers de prix et de la sensibilité prix des clients (‘willingness to pay’). 

Notes :

  1. George R. Brown Professeur de Marketing à la Rice University’s Jesse H. Jones Graduate School of Business
  2. Article publié dans le “Harvard Business Review” le 19 août 2016: A Quick Guide to Value-Based Pricing (citations traduites de l’anglais)
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